Mlle Lenormand, la Sibylle de St Germain

Publié le 10 Février 2017

Mlle Lenormand, la Sibylle de St Germain


     Impossible de parler de cartomancie française sans aborder la plus illustre des cartomanciennes : Marie-Anne-Adélaïde Lenormand (1772-1843). Célèbre, entre autres, pour avoir été la voyante attitrée de l'Empereur Napoléon et surtout de sa femme Joséphine. Ses prédictions et ses écrits à l'époque étaient des plus respectées.

     Il faut effectivement savoir que Mlle Lenormand était fort instruite, comme l'explique Marie Delclos dans l'introduction de son livre "Le livre du Petit Lenormand" :

     " Elle lisait et écrivait le latin couramment, ce qui lui permis de citer les auteurs latins (en latin) dans ses livres. Elle lisait aussi l'araméen (le Zohar par exemple était écrit en araméen, langue proche de l'hébreu) et parlais l'anglais.
  Manifestant dès l'enfance son don de voyance, elle fut rapidement fascinée non seulement pas ce don reçu à la naissance, mais aussi par l'ésotérisme sous toutes ses formes. Elle possédait une bibliothèque dans laquelle se côtoyaient Agrippa, Pic de la Mirandole et tous les kabbalistes connus de son temps, ainsi que les alchimistes et astrologues comme Cardan. Elle étudia l'astrologie, mais utilisait surtout le très curieux Télescope de Zoroastre, ou Clef de la grande cabale divinatoire des Mages qu'elle appelait sa Cabale de 99 de Zoroastre (en raison des 99 nombres du jeu), [...]
  Elle étudia la numérologie et se servit d'un autre très curieux ouvrage appelé La Roue de Pythagore ou Géomancie du Seigneur Christofe de Cattan. [...] C'est cet ouvrage qui inspira le Grand Jeu Lenormand.
  En fait elle utilisait toutes sortes de moyens divinatoires : le plomb fondu, le blanc d’œuf, le marc de café, les cendres, la fumée, des gouttes d'eau sur un miroir. Sans oublier ses mystérieux "33 bâtons grecs" en ébène, sculptés à chaque extrémité. Et enfin, elle accordait de l'importance à la physiognomonie."

     Bref, on peut dire qu'elle touchait sa bille... Autrement dit, ses écrits et les méthodes qui en découlèrent peuvent être considérés comme des références sérieuses.
     En matière de cartomancie française, ses livres permirent d'établir et/ou de valider mes symboles tels que décrits dans mes articles sur la cartomancie française (lien plus bas).

     Et pourtant une contradiction s'impose : alors que Mlle Lenormand décrivait les symbolismes des cartes de manière classique, pourquoi les Jeux connus sous son nom (particulièrement Le Petit Lenormand, le plus célèbre des jeux de "cartomancie", de nos jours encore) divergent de ces symboles?

 

     Effectivement, quand par exemple Mlle Lenormand décrit dans ses œuvres le Valet de Pique comme un traitre et un menteur, pourquoi dans le Petit Lenormand la même carte devient celle de L'Enfant, symbole de bonté et d'affabilité ? Comme le tristement célèbre 9 de Piques, visage de la mort (par laquelle elle aurait annoncé à Robespierre sa décapitation), est devenu L'Ancre dans "son" Jeu, symbole de stabilité et de sérieux ? Et que dire de cette pauvre Dame de Trèfles, allégorie de l'amie sincère et dévouée, devenue Le Serpent annonçant ennemis, trahison et malheurs ? Etc.

     Ou encore, pourquoi dans ses livres Mlle Lenormand parlait d'ajouter les quatre 2 pour obtenir un jeu de 36 cartes, alors que tous les Petit Lenormand sont ajoutés des quatre 6 ? Pourquoi donc tant d'incohérence entre ses écrits et ce Jeu ?

Mlle Lenormand, la Sibylle de St Germain

     La réponse est très simple : Parce que M.-A. Lenormand n'a JAMAIS dessiné Le Petit Lenormand. Bien qu'elle conceptualisa Le Grand Lenomrand (moins utilisé de nos jours que le "petite", puisque bien plus complexe), elle n'utilisait que des cartes classiques.

    " Le Petit Lenormand tire son origine d'un jeu allemand de 1798, Das Spiel der Hoffnung ("Le Jeu de l'Espoir"), créé par Johann Kaspar Hechtel. Il fut édité ensuite sous le nom de Mlle Lenormand pour des raisons commerciales." (M. Deslclos)


     Comme beaucoup, j’ai personnellement été déçu de l’apprendre... J'utilisais régulièrement "Les Cartes Mystiques de Mlle Lenormand" (réédition du Petit Lenormand), puis plus récemment le sublime "Lenormand des rêves enchantés". Et c'est frappant de se dire que nous sommes nombreux à utiliser ce Jeu, pensant contenir la connaissance et la sagesse d'une grande cartomancienne, alors qu'il n'en est rien. Car non seulement ces jeux ne sont pas de la main de Mlle Lenormand, mais de plus, ils ne correspondent en RIEN aux symboliques telles qu'elle les utilisait et les décrivait dans ses ouvrages. On aurait simplement (et soi-disant) trouvé ce "Jeu de l'Espoir" chez Mlle Lenromand après sa mort, le reste n'est qu'une affaire de publicité qui a plutôt bien fonctionné…

 

          Pourtant, le but ici n'est aucunement de chercher à décrédibiliser Le Petit Lenormand. Ce sont des jeux plus que respectables et ayant largement fait leurs preuves, dont les symboles restent très inspirants, utilisés tant par nombre d’amateurs que de professionnels. Et les innombrables versions et rééditions de ces jeux prouvent bien leurs succès.

     Il s'agit en revanche de souligner que les Petit Lenormand sont plus à considérer comme des oracles (aux symboles sans réelles correspondances précises) que comme de la cartomancie, avec laquelle ils n'ont aucun lien.

Incomparable donc avec le sujet de mes articles sur la cartomancie française.

Mlle Lenormand, la Sibylle de St Germain

Le Jeu de l’Espoir, dit "Petit Lenormand" (1799)

 

     Lorsque Johann Kaspar Hechtel publie en 1799 « Le Jeu de l’Espoir, un jeu de société divertissant et raffiné avec 36 cartes à motifs, enluminées, livret relié » (pour la maudite somme de 30 Kreuzer), c’était initialement un jeu de société destiné à représenter différents aspects de la vie quotidienne, un peu à la manière d’un jeu de l’oie. Les cartes étaient alors placées dans leur ordre numérique, pour constituer une sorte de plateau de jeu dont chaque carte représentait une case sur lesquelles on se déplaçait par lancés de dés.

 

     Son objectif était de traverser différentes étapes, positives ou négatives, jusqu’à atteindre la carte numéro 35 (L’Ancre, symbole de l’Espoir qui donne son nom au jeu), et d’éviter la numéro 36 (La Croix, qui stoppait nette la partie pour le joueur). Ce sont les dés qui décidaient de l’avancée du joueur, et des jetons étaient cumulés à mesure de la partie, le but étant d’en remporter le maximum.

 

     Ce genre de jeu était effectivement souvent vu comme oraculaire, ce qui redonne un aspect de prédiction à ces cartes. Mais en aucun cas ce "Jeu de l’Espoir" (ou Petit Lenromand) ne correspond aux valeurs symboliques de la cartomancie classique, et encore moins à celles établies par Mlle Lenormand. Il peut être vu comme un oracle divinatoire, mais dont les symbolismes ne sont pas liés à ceux des cartes classiques.

 

 

Plus de détails donnés par les éditions anglaises de cartes Malpertuis Designs Ltd, spécialisé dans la réédition des Lenormand et Jeu de l'Espoir : 

"

            Contrairement au Tarot, dont l’histoire reste controversée, voici maintenant l’origine des carets Lenormand. Des recherches récentes ont prouvé que le premier jeu Lenormand reconnaissable a été imprimé en Allemagne par Johann Kaspar Hechtel dans le cadre d’un jeu appelé Le Jeu de l’Espoir. Des rapports et des documents publicitaires ont survécu depuis cette période ont indiqué que ce jeu était disponible au moins en 1799.

 

            Un grand nombre des images incluses dans le jeu d’Hechtel dérive de sources antérieures, et il y a maintenant des preuves convaincantes montrant que les cartes utilisées pour dire la bonne aventure avec du marc de café ont influencé les choix d’Hechtel pour ses images. Mais Le Jeu de l’Espoir est admis comme étant le premier jeu comprenant spécifiquement les nombres, les images, et crée précisément ce qui apparaît en tout point comme les jeux Lenormand.

 

            Le nom « Lenormand » lui-même provoque souvent une certaine confusion. Hechtel ne l’a pas utilisé, et seuls les jeux ultérieurs l’ont adopté de la diseuse de bonne aventure française Marie-Anne Lenormand. La célébrité de Mlle Lenormand atteint son apogée à l’époque Napoléonienne, bien des années après la publication du Jeu de l’Espoir. Il n’y a aucune preuve tangible qu’elle ait utilisé ce jeu qui porte aujourd’hui son nom. En fait, ce n’est qu’en 1846 – trois ans après la mort de Mlle Lenormand – qu’une édition fut publiée pour la première fois sous le nom de « Lenormand » comme tentative opportuniste de faire fortune sur sa réputation.

 

            Lenormand est resté très populaire en Europe la majeure partie du dix-neuvième siècle. Il a cependant été largement éclipsé par le renouveau du Tarot au vingtième siècle qui n’a jamais cessé depuis. La mise en lumière du tarot signifiait que Lenormand disparaissait en arrière-plan. Certains jeux Lenormand sont restés disponibles mais ils n’ont jamais reçu l’attention ou l’érudition consacrée au Tarot. Jusqu’à très récemment, Lenormand était surtout un intérêt pour les spécialistes, n’apparaissant généralement que comme une note en bas de page dans les guides de Tarot.

 

            Les dernières années ont vu un regain d’intérêt pour Lenormand, avec de nouveaux livres et de nouvelles publications à un rythme croissant. Plus de nouveaux jeux Le Lenormand ont été imprimés au cours des cinq dernières années que durant les cent dernières années, et Le Lenormand est plus populaire encore qu’à son apogée originale. Surtout l’intérêt pour les cartes s’est répandu dans le monde entier. Plutôt que de se limiter à l’Europe, il y a maintenant des lecteurs et des collectionneurs de jeux Lenormand partout dans le monde.

 

            La raison de cette explosion d’intérêt est bien sûr ouverte au débat, mais il est raisonnable de supposer que la nouvelle popularité du Lenormand repose sur trois facteurs principaux. D’abord, le jeu fournit des messages beaucoup plus simples et plus directs que le Tarot. Cet appel pour les lecteurs à la recherche de réponses claires et non équivoques. En second lieu, Le Lenormand reste non terni par les associations occultes qui peuvent rendre certains débutants nerveux ou hésitants à propos de l’exploration du tarot. Troisièmement, et le plus pertinent selon moi en tant que concepteur, la séquence des images et la structure globale du Lenormand ont encouragé de nombreux artistes professionnels et amateurs à créer de nouveaux jeux originaux. La variété accrue des jeux couplée avec leur disponibilité beaucoup plus large, a suscité un intérêt pour le Lenormand plus grand que jamais auparavant.

 

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Mlle Lenormand, la Sibylle de St Germain

 

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Mlle Lenormand, la Sibylle de St Germain

Sources principales :

- "L'Oracle parfait, ou Le passe temps des dames : art de tirer les cartes avec explication", de Marie-Anne Adélaïde Le Normand.
- "Le livre du Petit Lenormand", de Marie Delclos.

- "Le Petit Lenormand", de Colette Sylvestre.
- Différentes éditions du jeu "Le Petit Lenormand"

 

Les PDF de certains livres écrits de la main de M.-A Lenormand :

 

 

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Rédigé par Gabryann Myrddin

Publié dans #Divinations et Voyances, #Divers

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C
Merci vraiment pour cet éclairage sur l'origine de cet oracle. Le marketing a existé avant le mot.
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